lundi 21 juin 2010

Au nom de quelle liberté ?

Nathalie Blanchard soutient s'être fait couper ses prestations de maladie
longue durée après que son assureur, Manuvie, soit tombé sur des images d'elle,
publiées sur Facebook. Elle considère qu'il s'agit d'une intrusion dans sa vie privée
et que quelques photos, où on la voit souriante, ne peuvent justifier
de lui enlever sa seule source de revenus. - Photo: Alain Dion, La Voix de l'Est

par Annie Laforest

Internet permet à tous les individus de s’afficher publiquement, totalement et librement. Chaque individu peut se définir et s’afficher sur un espace virtuel dont il est le seul maître à bord. Il publie son identité virtuelle et la rend accessible à tous. Et sans trop savoir pourquoi, il y étale son intimité, il y affiche des informations personnelles et il décide à un moment ou à un autre, de s’étendre à tous les réseaux. La popularité des réseaux sociaux laisse croire que ces utilisateurs ne comprennent pas encore que tout ce qui est publié sur Internet l’est de façon permanente et qu’en plus d’en perdre les droits, elle devient de notoriété publique. Cette traçabilité qu’il laisse de lui-même dans cet univers virtuel a et aura inévitablement des conséquences dont personne ne connaît l’ampleur à ce jour. Qui aurait le gout de laisser trainer son ADN partout où il passé et de laisser les autres le récupérer et le réutiliser sans autorisation?

« L’identité numérique d’un individu est composée de données formelles (coordonnées, certificats…) et informelles (commentaires, notes, billets, photos…). Toutes ces bribes d’information composent une identité numérique plus globale qui caractérise un individu, sa personnalité, son entourage et ses habitudes. Ces petits bouts d’identité fonctionnent comme des gènes : ils composent l’ADN numérique d’un individu. » (Cavazza. 2007)

Au nom de la liberté, doit-on tout permettre sur Internet? Ceci est une bien grande question, mais disons qu’actuellement, il semble que tout le monde se permet à peu près tout… sans réellement réfléchir aux implications que cela pourrait avoir dans le futur… « Le jour où, au sein de l’État, chaque fonctionnaire qui détient une parcelle de la puissance publique pourrait tout savoir de chaque homme, de chaque famille, de chaque entreprise, ne voit-on pas à quels risques l’administré serait exposé ? » (Bernard Tricot, Rapport de la Commission informatique et libertés, 1975.) (Lakel, Amar. 2007.) Qu’adviendra-t-il de ces jeunes qui aujourd’hui dévoilent à la planète entière l’ampleur de leur expérience d’adolescence ?

Une identité particulière possède une valeur sans égal dans la relation de pouvoir que l’on peut établir avec un individu : l’identité personnelle. Une identité qui relie une somme d’informations à une vie biologique unique, et ce, de façon indiscutable. (Lakel, Amar. 2007.)

Mais il y a tous ceux qui sous une identité frauduleuse, abusent et utilisent les plus naïfs de ce monde. Il y a ces pédophiles qui en ont fait leur terrain de prédilection. Et il y a ces compagnies peu scrupuleuses qui épient votre vie privée pour l’utiliser à leur avantage... et récupérer leur mise. Rappelons-nous l’histoire de cette femme qui s’est fait couper ses prestations de maladie longue durée après que son assureur ait consulté sa page Facebook et découvert les secrets de sa vie privée?

En effet, Nathalie Blanchard soutient s'être fait couper ses prestations de maladie longue durée après que son assureur, Manuvie, soit tombé sur des images d'elle, publiées sur Facebook. Elle considère qu'il s'agit d'une intrusion dans sa vie privée et que quelques photos, où on la voit souriante, ne peuvent justifier de lui enlever sa seule source de revenus. (Fortier-Gauthier, Étienne. 2009) Y a-t-il réellement eu invasion de sa vie privée alors qu’elle l’a « librement » étalée sur son réseau social préféré?

Doit-on règlementer l’identité virtuelle? À quel endroit commence la liberté de l’un et où se termine la liberté de l’autre? Et où commencent et finissent les frontières? Doit-on établir des limites et si tel était le cas, quelles seraient les limites de l’acceptable? Il devient facile d’imaginer un pouvoir inquisitorial s’installer et régir un univers d’information et de connaissances. Cela me rappelle le livre de Georges Orwell, 1984, et je frémis juste à y penser…

Quelles lois, quelles règles et quelles frontières peuvent bien régir cet univers virtuel? D'un côté, il y a cette grande majorité d’individus qui se l’approprie sans réfléchir aux conséquences que cela pourrait bien avoir ultérieurement dans leur vie. Ces acteurs publics créent les conditions mêmes de leur propre infraction pendant que de l’autre côté, l’on réfléchit à la façon d’imposer les règles et les limites d’un univers libre et déréglementé… C’est bien compliqué tout cela. Pour le moment ma règle d’or : Suivre ma conscience!

Bibliographie

Cavazza, Fred. 2006. Qu'est-ce que l'identité numérique? [En ligne] URL : http://www.fredcavazza.net/2006/10/22/qu-est-ce-que-l-identite-numerique/ Consulté le 18 juin 2010

Fortier-Gauthier, Étienne. 2009. Son assureur la surveille sur Facebook: « Je vais me battre ». La Voix de l’Est. [En ligne] URL : http://technaute.cyberpresse.ca/nouvelles/internet/200911/23/01-924153-son-assureur-la-surveille-sur-facebook-je-vais-me-battre.php. Consulté le 19 juin 2010.

Lakel, Amar. 2007. Interconnexion et identités électroniques : Vers un système de fichiers répartis. (English). Conference Papers -- International Communication Association. Annual Meeting, p1-1.

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